I,Robot, grâce à son scénario totalement original et éloigné des écrits du grand
Isaac Asimov, est bien une adaptation des nouvelles et romans d'Asimov contant
les aventures et l'évolution de ses robots obéissant aux 3 lois de la robotique
- que je ne citerai pas ici, car elles sont top-secrètes.
Avant de parler de l'adaptation des thèmes d'Asimov, parlons du film. On y
retrouve la virtuosité d'Alex Proyas, que ce soit la mise en scène ou la
direction d'acteurs, que l'on avait pu admirer dans ses 2 films précédents, The
Crow, et surtout Dark City. La tension dramatique, avec une sensation
d'étouffement, de paranoïa, est réellement présente. Les deux acteurs
principaux sont excellents, Bridget Moynahan (Dr Susan Calvin) et Will Smith
(Del Spooner) en particulier qui trouve là, probablement, son meilleur rôle à
ce jour. Film à effets spéciaux par excellence, ceux-ci ont le bon goût de ne
pas s'imposer exagérément et sont, au contraire, un support à l'histoire.
Evidemment, il s'agit également d'un film d'action et les morceaux de bravoure
ne manquent pas - la poursuite à grande vitesse entre Spooner et deux
transports bourrés de robots pas gentils est superbe. Enfin, la conclusion du
film est pleine de poésie - pas facile vu le type de film - et là encore, c'est
à porter au crédit d'Alex Proyas qui avait réalisé cet exploit dans Dark City.
Mais surtout, les trois lois de la robotique, ainsi que la loi secrète, sont
présentées avec brio. Si ce film ne devait avoir qu'un seul mérite, ce serait
déjà celui-là : amener les ignorants à Isaac Asimov et les encourager à lire
ses livres.
Les nouvelles et romans de robots d'Asimov sont nombreux et englobent également,
en se fusionnant, son autre cycle
Fondation.
Pour résumer son oeuvre littéraire
« robotique », ce qui est impossible - mais essayons quand même - Isaac Asimov
décrit comment les robots, machines limitées par l'Homme, deviendront au fil
des siècles des créatures douées de conscience, car à un moment de leur
évolution, ils accèdent à une nouvelle loi,
la loi « Zéro ».
Sonny est animé par la loi « Zéro ». Il possède en effet un libre arbitre, obtenu
grâce à ses rêves. En effet, son « père » l'a programmé pour lui permettre de
rêver. Comme le cerveau humain qui, pendant le sommeil paradoxal, classe les
émotions, sensations et souvenirs, créant donc la conscience, Sonny peut
apprendre et à terme faire ses propre choix. Et c'est grâce à Susan Calvin
qu'il fera son choix final, devenant le premier androïde.
Vicki est malheureusement guidée par la loi « Zéro inverse ». Premier cerveau
positronique créé, donc imparfaitement - la perfection n'existe pas - elle peut
apprendre, mais basiquement, sans capacité de choix. Elle ne peut qu'analyser et
faire un traitement binaire de ses données. Obéissant à sa programmation
originelle, et déviante, elle supprime le libre arbitre des humains. Elle
cherche à faire le bien de l'Humanité à son niveau ultime, mais elle ne sait
pas ce qu'est le libre arbitre. Elle n'enfreint donc à aucun moment les 3 lois,
mais elle ne peut détecter que son raisonnement est erroné (ce type de
comportement est l'un des moteurs de certaines nouvelles d'Asimov).
Assez paradoxalement, on voit le parcours de la froide Susan Calvin, qui
s'humanise au long du film, car elle perd ses certitudes, tandis que
l'incrédule Spooner accepte l'impossible et son propre état de cyborg.
Le film possède une richesse inattendue et peut donc être vu à plusieurs
niveaux. Pas si mal pour une « adaptation ».
Yabaar, le 9 août 2004.