Vampyr ou l'étrange aventure de Davis Gray Carl Theodor Dreyer (1932)
(France-Allemagne - N&B - 1h12)
Julian West, Henriette Gérard, Jan Hieronimko...
L'histoireDavid Gray rentre à son auberge où un vieil homme lui confie un paquet à n'ouvrir qu'en cas de décès. La vie déjà somnambulique de Gray bascule alors. Il arrive dans un château étrange, noyé dans la brume, où la fille du châtelain,
Léone, semble possédée. Le livre contenu dans le paquet révèle qu'en fait elle est vampirisée par une certaine
Marguerite Chopin avec la complicité du médecin qui la soigne.

Ce qui marque au commencement de ce film c'est une atmosphère onirique, étrange et dérangeante. Et ce personnage qui erre dans un labyrinthe de bâtiments, suivant des ombres, croisant des personnages difformes. Pour qui a vu
Eraserhead de
David Lynch, il est difficile de ne pas penser que ce dernier s'est inspiré de ces scènes mêlant à la fois rêves et cauchemars. Dans les premières scènes qui sont de loin mes préférées, Dreyer distille de purs instants de terreur. Une clé qui tourne seule dans une serrure, gros plan sur le visage terrorisé de David Gray alors que celui du vieil homme pénétrant dans sa chambre reste flou. Il y a dans ces images un mélange effrayant et savant de réalisme et d'étrangeté qui vous envoûte.
La suite offre un parallèle avec
Carmilla, la nouvelle de
Sheridan Le Fanu paru en 1872 dont le film s'inspire, mais sans pour autant oser mettre en scène les relations équivoques et saphiques qui s'illustraient dans l’œuvre originale. Les mœurs de l'époque ne s'y prêtant pas. Un autre texte (ou recueil de textes ?) semblent être aussi à l'origine du film :
In the glass darkly, toujours de
Sheridan Le Fanu.
La bande son est également à évoquer tant elle est particulière. En effet, elle est un mixte de film sonore et de film muet. Les dialogues, s'il en est, sont extrêmement épurés, ramenés le plus souvent à quelques mots éparses ne recevant le plus souvent aucune répartie. Et
Dreyer utilise encore l'ardoise, principalement pour retranscrire des pages du livre que les protagonistes vont lire.
Dreyer, qui admirait le
Nosferatu de
Murnau (1922), voulait en reprendre les principes formels et notamment le style d'éclairage où l'opposition des blancs et des noirs était une métaphore visuelle de la lutte du bien et du mal. À la suite d'une erreur technique, la pellicule fut voilée et tout apparaissait dans un univers indistinct et blanchâtre. Il décida d'utiliser cette erreur pour en faire le principe émotionnel du film. (source :
Dictionnaire mondial des films Larousse 2005)

Une scène particulièrement réaliste et glauque à souhait : la transfusion sanguine.