Nous sommes en septembre 1999. Sur terre, suite à la 3ème guerre mondiale qui a détruit la
Suisse en 1987, les nations ont établi une paix durable et ont décidé d’enfouir tout l’arsenal
nucléaire existant sur la « face sombre » de la Lune sous le contrôle de la base lunaire Alpha
récemment achevée.
En ce 9ème mois de l’an de grâce 1999, des perturbations électro magnétiques affectent les
dépôts nucléaires et perturbent la préparation d’une mission habitée en direction de la planète
Meta.
Le 9 septembre 1999, John Koenig est nommé commandant d’Alpha en remplacement de
Gorski.
John Koenig fait rapidement le lien entre les perturbations magnétiques et les problèmes dont
sont victimes ses cosmonautes.
C’est hélas trop tard…
Le 13 septembre 1999, une explosion nucléaire massive affecte les dépôts et la réaction en
chaîne projette la Lune hors de son orbite terrestre. Les 311 membres de la base Alpha
survivent mais se retrouvent à la dérive dans l’espace.
Koenig et les siens vont donc devoir survivre, chercher une nouvelle terre où habiter,
rencontrer « d’autres civilisations » et affronter de multiples dangers.
Mais très vite, on perçoit que cette dérive n’est peut être pas aléatoire et qu’une force
supérieure les guide et les protége…
Série créée et produite par Gerry et Sylvia Anderson. Les Anderson sont un mythe dans le
monde de la télévision. Ils ont commencé par produire des séries dont les héros étaient des
marionnettes. Leurs premières créations n’ont pas connu de véritable réussite, mais à partir de
Fireball XL5 leurs productions vont connaîtrent un succès croissant (Stingray, Captain
Scarlet).
De cette période marionnette, leur œuvre la plus connue est sans aucun doute Thunderbirds.
En 1970, les Anderson se tournent vers les acteurs réels avec la série UFO.
Puis vient Space 1999.
La production de la 1ère saison commence en novembre 1973 pour s’achever en avril 1975.
La série est coproduite par ITC et la RAI. Elle est tournée dans le studio de Pinewood.
Chaque épisode coûte 300 000 dollars (un record pour l’époque).
Le premier épisode est diffusé le 4 septembre 1975 sur ATV (et le 13 décembre de la même
année sur TF1).
Une seconde saison est tournée de novembre 1975 à août 1976 pour être diffusée sur Atv a
partir du 18 septembre 1976. Mais cette seconde saison produit par Fred Freiberger « le
fossoyeur de la science-fiction » est un tel ratage que nous préférons ne pas en parler par
choix totalement subjectif et assumé. Nous préférons nous concentrer sur ce chef d’œuvre
qu’est la 1ère (et pour moi unique) saison de Space : 1999.
Space : 1999 est avant tout une série philosophique sur la condition d’être humain. Tournée
dans la 1ère partie des seventies (avant donc la déferlante « Star Wars »), elle est fortement
inspirée par le chef d’œuvre de Kubrik 2001 : Odyssée de l’espace (il est d’ailleurs à noter
que le créateur des effets spéciaux de la série a acquis une brillante réputation sur le film de
Kubrik. Il a également travaillé sur Alien).
On a souvent reproché à Cosmos de manquer d’humour (du moins dans la 1ère saison). Mais
auriez-vous le sens de l’humour si vous étiez projeté loin de chez vous, sans espoir de retour
et avec peu de chances de survie ?
Space : 1999 s’interroge donc sur les origines de l’humanité et sur notre foi en une existence
supérieure.
En ce qui concerne l’origine de l’homme, les alphans font en quelque sorte un voyage à
l’envers. Ils partent ainsi de ce qu’ils auraient pu devenir (dans autre temps, autre lieu, ils
font la connaissance de leurs doubles plus âgés) et vont jusqu’aux graines qui ont donné
naissance à la vie sur terre (dans le testament d’Arcadie, les alphans posent le pied sur la
planète qui est à l’origine de la vie sur Terre. Ils découvrent par la même occasion que le but
de leur dérive n’était pas aléatoire mais avait bien pour « mission » de ressemer des graines de
vie sur cette planète désormais morte). Les alphans retourneront même à l’âge de pierre (un
étrange brouillard les transformera pour quelques temps en hommes préhistoriques dans « le
grand cercle »). Enfin, ils assisteront même à l’éclosion d’un astre solaire (dans puissance de
la vie, la « force » qui envahit et détruit Anton Zoref n’est-elle point un soleil voire une
galaxie en devenir ?).
En ce qui concerne la foi, là aussi le symbolisme est bien présent. Ainsi, dès le 3ème épisode
(le soleil noir) les alphans traversent un trou noir et font la « connaissance » d’une force qui
semblerait vouloir guider la Lune. Cette entité supérieure sera évoquée de façon quasi
permanente tout au long de cette 1ère saison. Dans « collision inévitable », la foi de Koenig
est mise à mal par Arra (Marra en VF) qui semble elle aussi en contact avec cette force
mystérieuse. Dans « au bout de l’éternité » c’est au diable en personne que les alphans
semblent avoir à faire (le nom de Balor vient de Baal, un avatar ancestral du mal). L’épisode
« en désarroi » parle de spiritisme (un fantôme hante Alpha). Enfin, le dernier épisode déjà
évoqué « le testament d’Arcadie » est totalement mystique car Luke Ferro et Anna Davies (les
deux alphans qui restent sur Arcadia) ne sont-ils point de nouveaux Adam et Eve.
On le voit donc, c’est cette mythologie sur les origines présentée tout au long de la 1ère saison
qui fait le sel et l’intérêt de Space : 1999. C’est ce questionnement permanent sur nous-mêmes
qui nous interpelle…
Et c’est cette dimension fascinante qui sera hélas absente de la seconde saison.
… Un peu de cette seconde saison. Devant le succès d’estime de la 1ère saison aux Etats-Unis,
ITC décide de produire une saison 2. Mais, pour bien entrer dans le marché U.S, on demande
à Gerry Anderson d’engager un producteur américain. C’est Fred Freiberger qui est choisi.
C’est à lui que l’on doit les pires épisodes de Star Trek saison 3 (d’où son surnom de
fossoyeur de la Science-Fiction puisque c’est grâce à ses efforts que NBC a pu enfin annuler
Star Trek au bout de 79 épisodes).
Freiberger voit seulement 8 épisodes de Cosmos et déclare « qu’il va sauver le navire ». Et il
décide donc d’abandonner le côté philosophique (trop intello pour lui qui vient du monde de
la pub) et recentre la série sur l’humour, l’action et les monstres. Et des monstres il y en a
partout, plus ridicules les uns que les autres.
Il supprime également les personnages de Paul Morrow, David Kano et surtout Victor
Bergman et les remplace par :
Tony Verdeschi (Tony Anholt) : Chef de la sécurité sur Alpha, il manque totalement de
charisme et est obsédé par une seule chose : fabriquer de la bière.
Et surtout…
Maya (Catherine Schell) : l’extraterrestre de la base, originaire de la planète Psychon, qui
peut se transformer en n’importe quelle créature existante. Idée certes séduisante au départ.
Mais elle se transforme en choses tellement ridicules et débiles que cela plombe tous les
épisodes de la seconde saison.
Cette seconde saison, où l’on trouve parfois des scénarios qui pourraient être intéressants, est
totalement décrédibilisée par un humour lourd qui pèse des tonnes et surtout par les monstres
qui sont maintenant à chaque coin d’Alpha.
Cette seconde saison est rejetée par le public du monde entier sauf…par les Américains qui la
préfèrent à la 1ère… allez comprendre.
Le point de départ de Space : 1999 est explosif : une réaction en chaîne nucléaire projette la Lune hors de son orbite et l’emmène, au gré de sa trajectoire hasardeuse et influencée par les forces de l’univers (gravitationnelles mais aussi divines ?), à l’encontre de ses origines et de sa destinée. Le nom de la planète Meta est intéressant à plus d’un titre : du grec « après » / « au-delà », cette planète est « au-delà » de l’orbite de la Lune autour de la Terre, et elle est « après » cette sortie cataclysmique d’orbite, « après » dans la destinée des Alphans. Au fil des aventures des Alphans, confrontés à leur destinée incertaine et la foi occasionnelle du commandant Koenig en une force supérieure, c’est de « méta » physique dont traite la série. Sur un ton posé et un style soigné, en ce qui concerne la première saison (seule essentielle avec une fin symboliquement aboutie tandis que la seconde saison est dispensable), Space : 1999 développe une dimension philosophique et parfois mystique qui crée un climat d’étrangeté et d’étranger, ce même étranger auquel nous serions confrontés en tant qu’Alphans. Cosmos 1999 est une réussite, pour ce qui est de la première saison (quel ne fut pas mon effroi en découvrant, des années après, les premières secondes effarantes de la seconde saison « Freibergerante ») et elle mérite absolument le détour par son orbite et sa base Alpha.
John Koenig, le lundi 2 août 2004.